Clap de fin pour la garantie légale de conformité dans les ventes d’équidés

Clap de fin pour la garantie légale de conformité dans les ventes d’équidés

Auteur : Fleur NOUGARET-FISCHER
Publié le : 04/01/2022 04 janvier janv. 01 2022

L’article 21 de l’ordonnance n°2121-1247 du 29 septembre 2021 relative à la garantie légale de conformité pour les biens, les contenus numériques et les services numériques a exclu l’application de la garantie légale de conformité pour les ventes d’animaux domestiques.

Ces dispositions entrent en vigueur à partir du 1er janvier 2022.

Retour sur la garantie légale de conformité

La garantie légale de conformité, introduite aux articles L217-1 et suivants du Code de la consommation, est applicable aux ventes conclues entre un vendeur professionnel et un acquéreur consommateur.
En matière équine, le vendeur professionnel est celui pour qui la vente d’équidé est une activité professionnelle ou commerciale.
Le consommateur, quant à lui, est un cavalier personne physique qui achète le cheval à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle ou commerciale.

- Les vices concernés

Le vendeur professionnel doit ainsi livrer un bien conforme au contrat au consommateur. En outre, il répond des défauts de conformité existant lors de la délivrance de celui-ci. 

Le bien est conforme au contrat s'il répond notamment, le cas échéant, aux critères suivants :
 
1° Il correspond à la description, au type, à la quantité et à la qualité, notamment en ce qui concerne la fonctionnalité, la compatibilité, l'interopérabilité, ou toute autre caractéristique prévue au contrat ;

2° Il est propre à tout usage spécial recherché par le consommateur, porté à la connaissance du vendeur au plus tard au moment de la conclusion du contrat et que ce dernier a accepté ;

3° Il est délivré avec tous les accessoires et les instructions d'installation, devant être fournis conformément au contrat ;

4° Il est mis à jour conformément au contrat.

En plus des critères de conformité au contrat, le bien est conforme s'il répond aux critères suivants :
 
1° Il est propre à l'usage habituellement attendu d'un bien de même type, compte tenu, s'il y a lieu, de toute disposition du droit de l'Union européenne et du droit national ainsi que de toutes les normes techniques ou, en l'absence de telles normes techniques, des codes de conduite spécifiques applicables au secteur concerné ;

2° Le cas échéant, il possède les qualités que le vendeur a présentées au consommateur sous forme d'échantillon ou de modèle, avant la conclusion du contrat ;

3° Le cas échéant, les éléments numériques qu'il comporte sont fournis selon la version la plus récente qui est disponible au moment de la conclusion du contrat, sauf si les parties en conviennent autrement ;

4° Le cas échéant, il est délivré avec tous les accessoires, y compris l'emballage, et les instructions d'installation que le consommateur peut légitimement attendre ;

5° Le cas échéant, il est fourni avec les mises à jour que le consommateur peut légitimement attendre, conformément aux dispositions de l'article L. 217-19 ;

6° Il correspond à la quantité, à la qualité et aux autres caractéristiques, y compris en termes de durabilité, de fonctionnalité, de compatibilité et de sécurité, que le consommateur peut légitimement attendre pour des biens de même type, eu égard à la nature du bien ainsi qu'aux déclarations publiques faites par le vendeur, par toute personne en amont dans la chaîne de transactions, ou par une personne agissant pour leur compte, y compris dans la publicité ou sur l'étiquetage.

Toutefois, le vendeur n'est pas tenu par toutes déclarations publiques mentionnées ci-dessus s'il démontre :
 
1° Qu'il ne les connaissait pas et n'était légitimement pas en mesure de les connaître ;

2° Qu'au moment de la conclusion du contrat, les déclarations publiques avaient été rectifiées dans des conditions comparables aux déclarations initiales ; ou

3° Que les déclarations publiques n'ont pas pu avoir d'influence sur la décision d'achat.

Enfin, le consommateur ne peut contester la conformité s’il a été spécifiquement informé que le bien s’écartait des critères de conformité énoncés ci-dessus. Néanmoins, pour cela il doit avoir expressément et séparément consenti à cet écart, lors de la conclusion du contrat.

- Les délais pour agir

L’acquéreur d’un bien dispose d’un délai de 2 ans à compter de la livraison de celui-ci pour agir sur le fondement de la garantie légale de conformité.

L’acquéreur peut solliciter la résolution de la vente. Dans ce cas, il restitue le bien au vendeur et celui-ci lui rembourse le prix. L’acquéreur peut aussi choisir de conserver le bien contre restitution d’une partie du prix.

L'avantage de cette garantie légale de conformité est la présomption d’antériorité des défauts qui apparaissent dans les deux ans qui suivent la conclusion de la vente. Dans ce cas, le défaut est réputé exister au moment de la vente, sauf preuve contraire. Il y a donc un renversement de la charge de la preuve au bénéfice de l’acquéreur.

Par exemple en matière équine, si une boiterie apparaissait cinq mois après la vente, elle était réputée exister au moment de la vente. Le vendeur devait donc prouver que le cheval n’était pas boiteux au moment de la vente et que la boiterie était liée à un problème postérieur à la conclusion du contrat. S’il ne parvenait pas à rapporter cette preuve, l’acheteur pouvait obtenir la résolution de la vente et en conséquence le remboursement du prix du cheval contre restitution de celui-ci.

Cette garantie était donc très protectrice pour les acquéreurs d’équidés, non professionnels.

Quels seront les recours désormais possibles à partir du 01er janvier 2022 ?

A partir du 1er janvier 2022, la garantie légale de conformité ne sera plus applicable en matière de vente d’animaux domestiques, ce qui inclut les équidés.

Le rapport au Président de la République relatif à l’Ordonnance du 29 septembre dernier précise que : "Les contrats de vente d’animaux domestiques restent couverts par les dispositions spécifiques du code rural renvoyant sous certaines conditions à la garantie des vices cachés du code civil." 

Ainsi, l’acquéreur d’un cheval, qu’il soit professionnel ou non, pourra agir seulement sur les fondements suivants :

• La garantie des vices rédhibitoires

La garantie des vices rédhibitoires est régie par les dispositions des articles L213-1 et suivants du Code rural et de la pêche maritime.

- Les vices concernés

Cette garantie est bien plus restrictive que la garantie légale de conformité car elle couvre seulement sept vices réputés rédhibitoires :
- l’immobilité ;
- l’emphysème pulmonaire ;
- le cornage chronique ;
- le tic proprement dit avec ou sans usure des dents ;
- les boiteries anciennes intermittentes ;
- l’uvéite isolée ;
- l’anémie infectieuse.

- Les délais pour agir

En outre, le délai n’est plus de deux ans mais de seulement 10 jours à compter de la livraison du cheval, pour agir à l’encontre du vendeur !

Seule l’uvéite isolée et l’anémie infectieuse ouvrent un délai de 30 jours à compter de la livraison.

- La procédure à respecter

De plus, l’acquéreur devra solliciter la nomination d’un Expert judiciaire vétérinaire afin de constater contradictoirement l’existence du vice rédhibitoire.
Ce n’est qu’après l’expertise qu’il pourra ensuite solliciter la résolution du contrat ou la diminution du prix.

Le délai, extrêmement court, et la liste limitative des vices admis rendent cette garantie totalement inadaptée et inapplicable aux ventes de chevaux.

• La garantie des vices cachés

La garantie des vices cachés est prévue aux articles 1641 à 1648 du Code civil.

- Les vices concernés

L’acquéreur du cheval devra alors rapporter la preuve de la réunion de trois conditions :
- le vice doit être caché ;

- le vice doit présenter une gravité telle qu’il rend le cheval vendu impropre à son usage ou diminue très fortement son usage ;

- le vice doit exister au jour de la vente.

- Les délais pour agir

Cette garantie constitue une garantie intéressante car l’acquéreur peut agir dans un délai de 2 ans à compter de la découverte du vice caché qui affecte le cheval.

- Une garantie expressément convenue

Cependant, elle reste très incertaine dans son application.

En effet, en application de l’article L213-1 du Code rural, la garantie des vices cachés, ne s’applique que si les parties ont exprimé leur volonté d’y recourir.

Or, en l’absence de clause expresse au sein du contrat, il sera très difficile pour l’acquéreur de rapporter la preuve de la volonté des parties de soumettre la vente à cette garantie.

Par ailleurs, il n’y a pas de présomption d’antériorité des défauts qui apparaissent dans les deux ans qui suivent la conclusion de la vente. Ce sera donc à l’acheteur de rapporter la preuve que ce défaut préexistait à la vente, preuve qui sera souvent difficile à rapporter.

• Le dol, vice du consentement

L’acquéreur d’un cheval peut également rechercher l’annulation de la vente sur le fondement de l’article 1137 du Code civil.

- Des manœuvres, mensonges, réticences dolosives

Le dol est « le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manœuvres ou des mensonges ».
La démonstration du dol nécessite la réunion de trois conditions :

- des manœuvres, mensonges ou la réticence dolosive (silence fautif) ;

- leur caractère déterminant pour l’acheteur : sans ces manœuvres, mensonges, il n’aurait pas acheté le cheval dans ces conditions ;

- leur origine : ils doivent émaner du vendeur ou d’un tiers de connivence.

Par exemple, si le vendeur n’informe pas l’acquéreur d’une grosse opération subie par le cheval quelques temps avant la vente et que cette opération a de graves conséquences sur le cheval, cela peut être considéré comme un dol. 

- Les délais pour agir

L’acquéreur du cheval qui est victime d’un dol au moment de la vente, dispose d’un délai de 5 ans pour agir à compter du moment où il a connaissance du vice.

Si l’acquéreur est victime d’un dol, il peut solliciter l’annulation de la vente, et par conséquent le remboursement du prix contre restitution de l’équidé. Il peut également solliciter l’allocation de dommages et intérêts.

Si ce fondement est avantageux en termes de délai, il reste peu utiliser en pratique. En effet, il sera très difficile de démontrer que le vendeur avait connaissance du vice qui affectait le cheval et l’a caché intentionnellement à l’acquéreur dans le but de conclure le contrat à des conditions plus avantageuses.
En conclusion, la seule solution pour palier à la suppression de la garantie légale de conformité est de signer un contrat de vente de cheval prévoyant expressément que le vendeur garantit les vices cachés au sens des articles 1641 et suivants du code civil.
Composé d’avocats compétents en droit des contrats et droit équin, le cabinet FISCHER rédige des contrats de vente d’équidé prenant en compte cette nouvelle réforme.
Si vous souhaitez sécuriser vos relations contractuelles, n’hésitez pas à faire appel à nos experts pour vous conseiller. Contactez-nous ici.

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