Entrée en vigueur du Décret n°2023-275 du 17 avril 2023 : Abandon de poste et présomption de démission sur le salarié

Entrée en vigueur du Décret n°2023-275 du 17 avril 2023 : Abandon de poste et présomption de démission sur le salarié

Auteur : Fleur NOUGARET-FISCHER et Johana ANDRE
Publié le : 07/05/2023 07 mai mai 05 2023

Décret n°2023-275 du 17 avril 2023

Ce mercredi 19 avril 2023 marque l’entrée en vigueur d’un décret qui bouscule les règles en matière d’abandon de poste par le salarié.
 
Autrefois, une telle situation obligeait l’employeur à entamer une procédure de licenciement, ce qui permettait au salarié de pouvoir bénéficier de l’allocation chômage. 

Dorénavant, ce n’est plus le cas puisque ce dernier se trouve présumé démissionnaire.

L’ALLOCATION CHOMAGE ET LE MODE DE RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL 

Par principe, le droit au chômage est accordé aux personnes involontairement privées d’emploi. 

Cela correspond entre autres aux cas de licenciement, fin de CDD, ou rupture conventionnelle du CDI.
A contrario, la démission est considérée comme un départ volontaire à l’initiative du salarié. 

Sauf rares exceptions où elle est dite légitime, la démission ne permet donc pas de bénéficier de l’allocation chômage.

L’ABANDON DE POSTE : UNE PRATIQUE JUSQUE LA NON REGLEMENTEE

L’abandon de poste se définie comme une absence répétée et injustifiée du salarié. Celle-ci s’observe pendant les heures de travail, et ne doit pas avoir été autorisée par l’employeur.

Jusqu’ici, ce procédé était non-réglementé et n’était assimilé à aucun mode de rupture du contrat de travail. 

La jurisprudence considérait qu’il ne pouvait caractériser à lui seul une volonté claire et non équivoque du salarié de démissionner. 

(Cour de cassation, chambre sociale, 24 mars 1998, 96-40.805 - Cour de cassation, chambre sociale, 10 juillet 2002, n°00-45.566)

En pratique, l’employeur finissait alors par avoir recours au licenciement pour motif personnel.

Ce dernier devait alors respecter toute une procédure.
  • En premier lieu, il devait tenter de reprendre contact avec le salarié afin de lui demander les motifs de son absence. Pour des raisons de force probante, il était préférable que cette demande soit réalisée par échange de mail.
  • En cas de tentative infructueuse, l’employeur devait ensuite mettre en demeure son salarié de justifier son absence et de reprendre son poste. Cette demande prenait nécessairement la forme d’une lettre recommandée avec accusé de réception.
  • Lorsque cette lettre restait sans effet, l’employeur devait ensuite convoquer le salarié à un entretien. Cette convocation était adressée par lettre recommandée avec accusée de réception, et devait préciser l’objet de la convocation ainsi que la possibilité de se faire assister.
  • L’entretien ne pouvait avoir lieu qu’à partir de 5 jours ouvrables après la réception de la convocation. Lors de son déroulement, l’employeur était tenu de préciser les motifs de la sanction envisagée. A défaut de présentation du salarié, la procédure de licenciement pouvait suivre son cours. 
  • A l’issue de l’entretien, l’employeur devait envoyer une lettre de licenciement par lettre recommandée avec accusée de réception. En cas de motif disciplinaire, la notification du licenciement devait être réalisée dans un délai d’un mois maximum. 

En définitive, l’employeur était contraint de respecter toutes les étapes procédurales du licenciement pour rompre le contrat avec son salarié.

Ce mode de rupture permettait à ce dernier de bénéficier de l’allocation chômage.

De plus, le salarié pouvait toujours saisir la juridiction compétente pour requalifier le licenciement en prise d’acte et ainsi obtenir une indemnité supplémentaire. Celui-ci devait alors détenir des preuves de faits graves commis par son employeur pouvant ainsi justifier son absence.

Nul doute qu’avec la nouvelle présomption de démission, les cas de licenciement et de prise d’acte consécutifs à un abandon de poste pourraient considérablement diminuer à l’avenir.

UNE PRESOMPTION DE DEMISSION DESORMAIS APPLICABLE, SOUS CONDITIONS 

En vertu du décret n°2023-275 du 17 avril 2023 et de l’article L1237-1-1 du Code du travail, une présomption de démission pèse désormais sur le salarié.

Pour faire valoir cette dernière, l’employeur doit nécessairement se conformer à une certaine procédure.

Lorsqu’il constate un abandon de poste, ce dernier a l’obligation de mettre en demeure son salarié.

Sur la forme, cet acte doit être adressé par lettre recommandée ou bien par lettre remise en main propre contre décharge.  

Sur le fond, l’employeur doit demander au salarié de justifier son absence et de reprendre son poste dans un délai de 15 jours minimum.

Une fois réceptionnée, le salarié conserve la possibilité d’y répondre :
 
  • Si le salarié se prévaut d’un motif et reprend son poste dans le délai imparti, alors le contrat de travail se poursuivra.

 Attention, le motif invoqué doit être valable. D’après une liste non-exhaustive reproduite dans le décret, il peut s’agir de : 
-  L’exercice du droit de retrait
-  L’exercice du droit de grève
-  Raisons médicales
-  Refus du salarié d’exécuter une instruction contraire à une réglementation
-  Modification du contrat de travail à l’initiative de l’employeur
 
  • A contrario, si le salarié n’y répond pas ou confirme ne pas vouloir reprendre son poste, alors il sera réputé démissionnaire et se verra ainsi privé d’allocation chômage.
Cette procédure est avantageuse pour l’employeur car elle apparaît beaucoup plus légère que celle du licenciement. A contrario, au vu des conséquences négatifs pour le salarié, celui-ci risque bien d’être dissuadé de procéder par cette voie. 
Composé d’avocats compétents en Droit du travail, le Cabinet FISCHER et son pôle droit des affaires et de l’entreprise est là pour vous accompagner et vous conseiller dans la défense de vos droits. Pour plus d’informations ou demandes de rendez-vous, Contactez-nous ici.

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